La danse chaotique du pouvoir haïtien prend des allures de tragédie politique. Sous la direction pâle de Fritz Alphonse Jean, le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) donne l’impression d’un chef d’orchestre ayant perdu sa partition. À chaque initiative du Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, le CPT réagit en sourdine, avec un temps de retard, comme surpris par son propre rôle.
La crise électrique : symbole d’un leadership à la traîne
L’épisode récent de la centrale de Péligre résume ce décalage. Tandis que la Primature orchestrait une mobilisation technique et politique pour relancer la production électrique, le CPT s’est contenté d’émettre une déclaration tiède évoquant des “discussions avec les populations du Plateau Central”. Une réponse qui sonne comme un rattrapage improvisé plutôt qu’une vision coordonnée.
“On ne dirige pas un pays en mode réactif”, commente un ancien ministre sous couvert d’anonymat. “Le CPT donne l’impression de découvrir les dossiers en même temps que le public.”
La presse, révélateur d’une approche erratique
Le traitement médiatique illustre cette inconstance. Après avoir ignoré la presse haïtienne pendant des semaines – préférant s’exprimer dans des médias dominicains – Fritz Jean a soudain convoqué les journalistes locaux. Un revirement opportuniste intervenu seulement après les critiques cinglantes de figures comme Marvel Dandin.
“Cette rencontre tardive avec l’ANMH et l’AMIH ressemble à de la comédie institutionnelle”, analyse une rédactrice en chef. “Depuis mars, le CPT considérait les médias comme des gêneurs. On ne reconstruit pas la confiance en un claquement de doigts.”
Le syndrome du suiveur
Plus de deux mois après son installation, Fritz Jean présente un bilan troublant :
- Absence de feuille de route claire sur les priorités nationales
- Réactions en cascade plutôt qu’initiatives structurantes
- Dialogue social réduit à des exercices de style
“Un vrai leadership anticipe, le nôtre se contente de commenter”, regrette un cadre de la société civile. La comparaison avec l’activisme de la Primature est cruelle : là où le gouvernement agit, le CPT semble se contenter d’observer.
L’urgence d’un sursaut
Haïti traverse pourtant une crise sans précédent qui exige :
✔ Une vision cohérente des institutions transitionnelles
✔ Un calendrier lisible pour les réformes clés
✔ Un dialogue inclusif avec tous les acteurs nationaux
“Le peuple mérite des capitaines, pas des spectateurs”, résume un universitaire. Alors que les gangs étendent leur emprise et que l’économie vacille, chaque hésitation du CPT alimente le sentiment d’un navire sans gouvernail.