Dans une république où l’opacité rivalise avec la théâtralité, même les affaires de cœur deviennent des scènes de pouvoir. L’affaire opposant Nathalie Sainvil Augustin, diplomate en poste au Mexique, à son ex-époux Smith Augustin, conseiller présidentiel, révèle moins un simple malentendu conjugal qu’un malaise plus profond : celui d’un pays où la vérité se dispute entre institutions défaillantes, perceptions arrangées et déclarations spectaculaires à la télévision.
Ce qui aurait pu rester un contentieux discret entre deux anciens conjoints a viré à la saga judiciaire et médiatique. Tout commence le 26 mai 2025, lorsque Smith Augustin, ancien ambassadeur et aujourd’hui conseiller présidentiel, déclare publiquement lors de l’émission Le Rendez-vous sur Gazette Haïti News : « Je suis divorcé ». Une phrase lourde de conséquences. En face, Nathalie Sainvil Augustin, toujours légalement son épouse selon ses dires, tombe des nues.
Loin de rester dans le registre du démenti poli, Mme Sainvil Augustin mandate l’avocat Me Dalounce Désir pour adresser une sommation officielle à son supposé ex-époux. Le document, délivré le 2 juin par l’huissier Dédier Soigner, exige de Smith Augustin qu’il réponde de ses propos sous peine de poursuites. Elle y affirme n’avoir jamais été informée d’aucune procédure de divorce, encore moins y avoir consenti. Elle rappelle même une visite en août 2024 à Haïti, où, selon elle, ils ont « partagé des jours heureux ».
Mais dans cette guerre des vérités, la contre-offensive du camp Augustin ne tarde pas : un acte de divorce daté du 25 novembre 2022 refait surface. Le document, émis par le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, porte le numéro 035662 et est dûment signé par l’officier d’État civil Jean Rodrigue Israël. En somme, sur le papier, le divorce est réel et enregistré.
Reste à savoir pourquoi et comment Mme Sainvil Augustin dit l’ignorer.
S’agit-il d’un divorce prononcé sans consentement éclairé, ou d’un coup médiatique pour affaiblir politiquement un conseiller présidentiel ? L’affaire soulève des interrogations troublantes :
– Pourquoi ce divorce n’a-t-il pas été communiqué clairement à l’intéressée ?
– Quelle est la responsabilité des institutions judiciaires dans cette opacité ?
– Et surtout : à quel moment la vérité devient-elle une option diplomatique ?
Alors que les documents s’opposent aux souvenirs, et que le droit heurte l’émotion, c’est l’image d’un pouvoir désinvolte avec ses responsabilités qui se dessine. Quand même le lien sacré du mariage devient un flou administratif, que reste-t-il à espérer de la transparence politique ?