Port-au-Prince, 31 juillet 2025 —
À six mois de la fin du mandat du Conseil présidentiel de transition (CPT), fixé au 7 février 2026, l’Organisation des États Américains (OEA) a rendu publique une feuille de route ambitieuse pour tenter de sortir Haïti de l’impasse. Sécurité, dialogue politique, légitimité institutionnelle, réponse humanitaire et relance économique : cinq piliers stratégiques pour un coût estimé à 1,37 milliard de dollars américains.
Mais si le document trace une voie de survie pour la nation, le financement reste hypothétique et la mise en œuvre périlleuse.
Sécurité : le socle de toute relance
Le premier pilier, doté de 96 millions USD, fait de la restauration de la sécurité la priorité absolue.
Deux phases sont prévues :
- Urgence (octobre 2025 – juillet 2026) : reprise du contrôle des zones critiques par la PNH et la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS), surtout dans le département de l’Ouest.
- Durabilité (juillet 2026 – juillet 2028) : reconstruction d’un système de sécurité publique fonctionnel et résilient.
Le plan prévoit la construction de bases avancées, la formation de policiers, la lutte contre le trafic d’armes et les recrutements de gangs, ainsi que la réforme du secteur judiciaire.
Dialogue politique et gouvernance
Le deuxième pilier, doté de 5,1 millions USD, vise à sortir de la crise de légitimité par :
- une mission de dialogue de haut niveau,
- des consultations avec les acteurs politiques et sociaux,
- la révision du projet de Constitution et une campagne de sensibilisation nationale.
L’OEA y jouerait le rôle de secrétariat technique, avec l’espoir de refonder un consensus institutionnel.
Processus électoral et légitimité institutionnelle
Avec 104,1 millions USD, ce troisième pilier ambitionne de préparer des élections crédibles :
- Réforme de la législation électorale,
- Mise à niveau du Conseil électoral provisoire (CEP),
- Soutien à l’Office national d’identification (ONI),
- Sécurisation des bureaux de vote et présence d’observateurs internationaux.
Mais aucune date de scrutin n’est fixée, alors que la fin du CPT approche à grands pas.
Réponse humanitaire d’urgence
Le quatrième pilier, le plus lourd avec 908,2 millions USD, cible les 1,3 million d’Haïtiens déplacés et les 4,7 millions en insécurité alimentaire.
Les actions comprennent :
- distribution d’eau et de nourriture,
- déploiement de cliniques mobiles et réhabilitation d’infrastructures,
- soutien psychologique et juridique aux victimes,
- gestion des épidémies et protection contre les violences basées sur le genre.
Relance économique et développement durable
Le cinquième pilier, doté de 256,1 millions USD, vise à briser le cycle de pauvreté :
- création d’emplois décents et relance des MPME,
- promotion de l’agriculture durable,
- modernisation des infrastructures routières, énergétiques et numériques,
- transformation digitale de l’administration et cybersécurité.
Un financement encore hypothétique
Avec un budget total de 1 369 524 000 USD, ce plan reflète l’ampleur des besoins. Mais les fonds reposent sur des engagements partiels et des promesses volontaires.
Sans mobilisation internationale, la feuille de route de l’OEA risque de rester un document d’intention, alors que le temps presse pour éviter un nouveau vide institutionnel.